Still (1998)

Still est un condensé du langage musical de Beat Furrer. Vus de plus près, les mouvements sonores complexes, moléculaires, se révèlent être un champ savamment construit de couches et de coupes superposées, où les instruments et les groupes instrumentaux restent toujours des voix. Furrer traite aussi la grande forme comme une sorte de distribution de l'énergie, ce qui lui permet une conduite uniforme de la sonorité d'ensemble. Cette grande arche s'entend facilement dans les contrastes dynamiques de Still, mais ce qui frappe encore plus est une sorte de transfert d'énergie, qui s'étend même aux plages de repos. La métaphore furrérienne d'une machine découplée qui continue à tourner est convaincante, mais elle ne peut être appliquée à l'évolution même du timbre. C'est moins le grincement de la scie évoqué par Furrer que les étincelles qu'elle projette - et dont les lumières suivent un faisceau orienté, quoique fortuit - qui équivalent à des particules musicales. Pour l'analyse, ce ne sont là que des images, de toute façon, qui pourraient intéresser un auditeur curieux. Ce qui fascine chez un compositeur aussi complexe que Furrer n'est en effet pas seulement la structure de la partition, mais l'immense variété des techniques de jeu des instruments isolés et de l'ensemble.