Oeuvres

Quatuor à cordes "...entre se taire et dire..." (1971)

Eric Gaudibert + Biographie

Ce quatuor m’a été commandé par Arts et Lettres, association culturelle très active à Vevey, qui souhaitait ainsi marquer son cinquantenaire. Les interprètes désignés étaient les membres du Quatuor de Genève (appartenant tous à l’Orchestre de la Suisse Romande). Cette commande m’a enthousiasmé par son sujet et en même temps effrayé par son importance.  En effet, né dans cette ville de Vevey, je connaissais bien l’ambiance du Théâtre où passèrent les gloires de la musique, où se déroulèrent plusieurs fois l’intégrale des quatuors de Beethoven. Les programmes étaient centrés sur la tradition classique. J’avais 35 ans. Comment poursuivre ma recherche aventureuse (j’habitais à Paris) et en même temps m’inscrire dans ce lieu chargé d’histoire.
Avec le recul, j’admire l’audace de Michel Rossier, président d’Arts et Lettres et mécène, qui avait su convaincre son comité de faire confiance à un jeune compositeur pour marquer cet anniversaire. Le concert eut lieu le 18 février 1972. Entourée par le Quintette avec clarinette de Brahms et le Quatuor de Debussy, cette création eut un certain retentissement et suscita dans le public, comme on le dit pudiquement, des « mouvements divers ».
Le sous-titre du quatuor « …entre se taire et dire… » vient d’un livre d’Aragon, intitulé « Je n’ai jamais appris à écrire ». J’avais été frappe par ces quelques mots qui reflétaient bien l’état dans lequel je me trouvais à l’époque : « pour moi, la phrase (dictée ?) d’où je pars vers quelque chose qui sera le roman, au sens illimité du mot, a ce caractère de carrefour, sinon entre le vice et la vertu, du moins entre se taire et dire, entre la vie et la mort, entre la création et la stérilité. »
Parti du souvenir des quatuors de Beethoven joués au Théâtre de Vevey, j’avais choisi le 3e Quatuor de l’op.18, en ré majeur, non seulement comme point de départ de ma composition, mais aussi comme situation de scène. En effet, tout commence comme si les musiciens allaient jouer ce quatuor de Beethoven… De là est issue une vaste fresque qui se déroule sans interruption.
Quand je compose, je pense en même temps à l’interprétation de ce que j’écris, c’est-à-dire à la présence des musiciens. Désirant ouvrir le “carré” traditionnel du quatuor, j’ai imaginé une sorte de mise en espace où les interprètes jouent en arc de cercle, debout (à l’exception naturellement du violoncelliste), et où, à un certain moment, ils se promènent en échangeant leur place. (Eric Gaudibert)

Concerts SMC Lausanne

Samedi 02 Décembre 2006 (Saison 2006-2007)
Quatuor Terpsycordes
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